Beaucoup d'Amour - Saison 2 / épis 104

Dire la mort, écrire la vie

Mes chères lectrices, Mes chers lecteurs,

Hier, j'ai lu un court livre qui m'a infiniment ému. “ Neuf mois “ ne parle pas de grossesse, mais du temps qu'il aura fallu à la femme de Philippe pour décéder d'un cancer. Ce livre est tout sauf un livre pour tenter de la faire revenir ou vanter ses nombreux mérites. 

C'est davantage un livre sur comment la maladie transforme inévitablement la vie d'un couple. Ce livre est un fragment de vie. La maladie côtoie la pulsion de vie de la nature qui pousse chaque espèce vivante à rivaliser d'ingéniosité pour survivre, conserver et transmettre.  Ce qui m'a touché, c'est que dans cet ouvrage, la mort est une réalité tangible, une donnée concrète, invariable.

J'ai aimé que l'auteur nous parle de sa femme, de sa singularité, de son côté rigide comme fantasque/hippie. J'ai aimé qu'il n'en fasse pas une héroïne tout en soulignant en filigrane son estime profonde pour certaines de ses qualités : son culot, sa persévérance, sa patience infinie.  

Elizabeth était écrivaine. C'est une des raisons pour laquelle, ce récit m'a touché. J'ai toujours cru que les auteurs faisait feu de tout bois et écrivait sur tout, y compris leur maladie et leur mort imminente.

Durant 9 mois, Elizabeth n'a consigné aucune ligne, n'a tenu aucun journal, ne s'est jamais épanchée sur le mal qui la rongeait. Elle s'est contentée de vivre et Philippe s'est contenté d'être à ses côtés dans les tâches les plus futiles, mais les plus essentielles : remettre mille fois les coussins en place sur les demandes répétées de sa femme, se blottir tout contre elle la nuit venue, lui préparer un bon repas, l'emmener où elle veut sans maugréer.

Je n'aime pas les livres grandiloquents encore moins ceux qui parlent de la mort. Je n'aime que ceux qui arrivent à retranscrire l'intimité de la mort. 

Impossible de ne pas se mettre à la place de Philippe et ne pas être infiniment touché(e) par cette aventure qu'est celle d'accompagner la personne que l'on aime à mourir selon sa volonté. Et oui, car dans ce livre, il est question du choix qu'avait fait Elizabeth de garder le contrôle sur sa mort en la médicalisant le moins possible.

Aimer quelqu'un, c'est accepter de le perdre peut-être plus tôt que ce qu'on aurait aimé. 

Je crois que l'on est jamais rassasié d'amour. On en veut toujours plus ! La mort met sans cesse l'amour au défi. C'est ce que nous dit ce livre qui est assurément un des plus jolis livres que j'ai lu dernièrement.

Plus que jamais, j'ai l'intime conviction que l'imminence de la mort nous oblige à jouir de tous les petits riens de la vie. Nous les vivants avons probablement tendance à l’oublier.

Doux jeudi.

Je vous embrasse fort,

Colombe